U.S. Marine Corps
Échecs et propagande militaire : un jeu pour vanter la guerre ?
Pour être placé, vous devez être fort… Pour gagner, vous devez être rusé…
Peut-être pouvez-vous être l’un d’entre nous : l’un des fiers Marines !
Métaphore de la guerre, mais une guerre feutrée et sans violence apparente où, à la fin de chaque bataille, les morts reforment les rangs, notre jeu est-il un bon support pour vanter les mérites de la guerre, la vraie ? Je n’en suis pas sûr en regardant cette vidéo de recrutement un peu mièvre, datant de 1993, pour le Corps des Marines des États-Unis, l’United States Marine Corps, l’une des cinq branches des forces armées des États-Unis. Il semble malheureusement que oui, à la lecture des commentaires sur YouTube : « Une de mes publicités Marine préférées » ; « Meilleure publicité pour le recrutement militaire »…
Le parallèle n’est pas nouveau. Depuis longtemps, les échecs servent de modèle abstrait à la guerre : deux camps opposés, un champ de bataille quadrillé, des unités spécialisées, un objectif clair, mater le commendement adverse. Vision éronnée de notre jeu, confrontation amicale, avant tout exercice intellectuel. Il n’y a pas de coups échangés, pas de blessures infligées. C’est le terrain de jeu de la pensée, où la violence n’est qu’une métaphore, une abstraction. Cette guerre n’a pas de victimes et les combatants se relèvent pour reprendre une nouvelle partie. « Les Échecs, écrit Francis Szpiner, c’est l’art de la guerre sans les charniers, c’est la résurrection des morts tombés au champ d’honneur, l’espoir perpétuel, la suprématie de l’intelligence sur la force, la culture de l’esprit. »
Là où notre jeu pourrait servir de support à la paix – à penser l’autre comme un adversaire, non un ennemi – il est ici mobilisés pour légitimer la guerre, la vraie. Le jeu devient l’alibi d’un discours de force, quand il pourrait être l’instrument d’un dialogue entre esprits.
Le roi vacille dans sa majesté, la reine détourne le regard… seuls les fous s’y reconnaîtront.


















